"j'aime, j'aime pas..."

Publié le par brulé


Cette petite phrase reviens sans cesse hanter les soirées « œnologie » (qui est un terme inapproprié) que nous organisons régulièrement à la cave. Le principe de ces soirées est simple : partir du vin, à l ‘aveugle pour le décortiquer, le disséquer et en tirer les information essentielles quand à son origine, son encépagement et sa vinification. J’ai beau chaque fois informer (au préalable) les participants que leur goûts personnels doivent être absolument tenus en recul, ils s’y accrochent chaque fois et le clament. Il me semble pourtant que lorsqu’un légiste dissèque un corps,  les affinités et les sentiments à l’égard du défunt passent au second plan. Le problème, car il y a problème est que, cet avis personnel, cette appréciation du « j’aime, j’aime pas » passe aux yeux du dégustateur comme un jugement qualitatif, à savoir : « si j’aime ce vin, c’est qu’il est bon ». La fameuse réaction du consommateur occasionnel de vin qui vous sort : « ho, moi je n’y connaît pas grand choses mais je sais reconnaître un bon vin d’un mauvais », ce qui est d’une stupidité effroyable mais que j’ai entendu des milliers de fois. Pourquoi est-ce stupide ?

Prenons par exemple le domaine de l’automobile. Personnellement, il m’arrive de conduire (même si j’ai abandonné ma bagnole), je reconnais à certaines d’entre elles une valeur esthétique, un certain confort, mais de là à en déduire la qualité réelle d’un véhicule, il y a du chemin. J’ai donc une approche que je pourrais qualifier d’esthétique. Je me laisse très certainement influencer par les rondeurs d’une telle, la couleur d’une autre, ou le design d’une troisième. J’apprécie la souplesse des sièges d’un monospace mais en aucun cas je ne pourrais juger réellement la qualité des matériaux, des tissus, et encore moins de la mécanique. En effet, je n’y connais pas grand chose et ne cherche pas réellement à connaître le monde de l’auto. En gros, entre un vrai bolide italien et une copie Chinoise, je n’arriverais pas, en quelques minutes à établir des différences qualitatives. Mon j’aime, j’aime pas restera donc un jugement purement esthétique sans relation à une quelconque qualité, et mon avis sur le monde de l’automobile n’aura aucune légitimité.

         Revenons-en au vin. Le consommateur occasionnel ou régulier de vin qui vous sort « je n’y connais pas grand chose mais je sais …. Etc » ne sait en fait pas grand chose, du moins pas plus que moi en bagnoles, c’est dire. Ce qui est essentiel pour juger correctement un vin, sans être pour autant un érudit, c’est de comprendre, premièrement pourquoi on aime ou pas, deuxièmement de comprendre d’où viennent c’est fameux arômes qui nous séduiront ou pas. C’est que l’on appelle l’analyse sensorielle et la reconnaissance des arômes, bref la base absolue de la dégustation. Sans cela, donner son avis est aussi ridicule que d’aller voter sans connaître les mécanismes de la politique : une illusion de démocratie, une vrai dictature de la médiocrité et du sans-effort. Et sans effort, le consommateur (tout comme l’électeur) devient un pion, un chiffre dans une statistique, une part de marché, sensible au pire comme au meilleur sans distinction.

J’avais déjà évoqué le fameux « chacun ses goûts » l’an passé, en expliquant comment je trouvais stupide une telle réflexion. Manifestement il y encore de nombreuses barrières à faire tomber dans le domaine du goût et il faudra du temps pour faire admettre aux français que le goût, ça n’est pas inné, mais que ça s’apprend…

 

 

 

 

 

 

                  

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J
Cher camarade, soiffard de vins vivants,votre article "j'aime, j'aime pas" m'a comme qui dirait un peu interloquée...Pas dans le fond, non, si vous ne parliez que dans le cadre d'une dégustation "professionnelle" (je ne parle pas uniquement de dégustation vinexpoienne qui ne servent qu'aux grandes firmes à détenir leur monde capitaliste du vin) alors je comprendrais que les seul mots "j'aime, j'aime pas" ne suffirait pas. il est notre devoir que de disséquer,  et trouver le vocabulaire approprié afin de juger un vin sur sa fraicheur, sa minéralité, son équilibre...etc.Evidemment que nous le pouvons puisque, notre expérience de dégustateur, fait partie intégrante de notre quotidien, elle est l'essence meme de notre passion.Demander au garagiste, au comédien, ou a la secrétaire d'en faire autant me parait etre une belle leçon de fausse humilité.Vous savez bien que lorsqu'on sert un Anglorre, un Thierry allemand, un Mosse ou un Foyard personne ne s'y trompe.Il faut juste se taire, laisser le vin faire sa place et juger de la vitesse à laquelle les bouteilles sont vidées. Et si par le plus heureux hasard, quelqun dit "ça j'aime" ou "ça c'est bon" ou encore "je voudrais en boire au sceau" et bien c'est une belle récompense.J'accepte complétement de me faire traiter d'extrémiste, si des gens qui ne détiennent pas "la base abolue de la dégustation" se bardent face à des Gannevat, des Barral ou des Courtois (pour ne citer qu'eux).Et parfois, lorsque je goute ces substances sacrées, il m'arrive d'envier la naïveté du "j'aime" ou "j'aime pas" et de ne pas etre parasité par les carcans de la fameuse analyse sensorielle!Ne soyons pas la caricature de ceux dont on se moquent. Ne leur ressemblont pas. Chacun est égal devant son gout. Fraternité sincére, et bravo pour votre implication.(je terminais un arbois pupilin de chez overnoy en écrivant...pardon pour les fautes de gout!)
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B
<br /> cher jaël,<br /> le fameux "j'aime, j'aime pas" concernait directement les cours de dégustation que nous organisons de temps à autres. Lors de ces séances, il est toujours préférable de faire passer en premier<br /> l'analyse sensorielle et seulement à la fin l'appréciation du "j'aime" ou "j'aime pas". A table, au restaurant ou en dégustation "plaisir" les choses sont toutes autres, car le plaisir doit<br /> primer...<br /> <br /> <br />
I
Je viens justement d'écrire un billet sur la dégustaion de l'agrément et sur les dégustateurs...! "Ces gens", dont je parle, vous les connaissez donc!
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